Fausses promesses : IA n’est pas la solution miracle contre le réchauffement

Ces derniers temps, de grandes entreprises technologiques et même les Nations Unies vantent les mérites des outils d’intelligence artificielle IA dans la lutte contre le changement climatique. Toutefois, un nouveau rapport d’un collectif d’associations environnementales remet sérieusement en cause ces allégations. Loin d’être une panacée, l’IA pourrait bien aggraver la situation en augmentant la consommation énergétique et en propageant la désinformation climatique.

Motivations des entreprises technologiques

Google, à la pointe du développement de l’IA avec son assistant Gemini (anciennement Bard), fait partie des entreprises les plus enthousiastes quant au potentiel de cette technologie pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. L’année dernière, la firme a publié un rapport affirmant que l’IA pourrait permettre de diminuer les émissions mondiales de 10% d’ici 2030, soit l’équivalent de celles de l’Union européenne.

Pour Kate Brandt, la directrice du développement durable chez Google, « l’IA a un rôle vraiment majeur à jouer dans la lutte contre le changement climatique« . Elle estime que nous sommes à un « point d’inflexion » où cette technologie peut faire des progrès significatifs pour atteindre les objectifs environnementaux.

Avertissements des défenseurs de l’environnement

Cependant, le rapport du Climate Action Against Disinformation (CAAD), un collectif d’organisations écologistes, dénonce ce qu’il considère comme de la désinformation de la part des entreprises technologiques. Selon Michael Khoo, responsable du programme sur la désinformation climatique chez les Amis de la Terre, « on nous répète sans cesse que l’IA peut sauver la planète, mais nous ne devrions pas croire à cette hyperbole« .

Le rapport du CAAD souligne que l’IA est loin de nous débarrasser des moteurs à combustion interne et que sa prolifération va en réalité augmenter considérablement la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre. De plus, cette technologie risque de devenir un vecteur important de désinformation sur le climat.

Impacts énergétiques de l’IA

Selon les chercheurs, pour répondre aux besoins croissants de l’IA, le nombre de centres de données devra doubler d’ici peu, ce qui entraînera une hausse de 80% des émissions liées à ces infrastructures, malgré des efforts pour en améliorer l’efficacité énergétique. Aux États-Unis, la durée de vie de certaines centrales à charbon est même prolongée pour satisfaire la demande énergétique de l’IA.

D’ici 2026, les serveurs dédiés à l’IA pourraient consommer autant d’énergie que la Suède. En cause : la complexité des opérations d’IA, qui nécessitent jusqu’à 10 fois plus de puissance de calcul qu’une simple recherche en ligne. L’entraînement du célèbre ChatGPT d’OpenAI peut ainsi consommer autant d’énergie qu’une centaine de foyers américains sur un an.

Pour Michael Khoo, « il n’y a aucune raison de croire que l’IA réduira la consommation d’énergie. Toutes les preuves indiquent qu’elle va massivement l’augmenter en raison de la multiplication des centres de données ».

Prolifération de la désinformation climatique

Au-delà de son impact énergétique, l’IA représente également un risque de désinformation accru sur les enjeux climatiques. En permettant une production rapide et peu coûteuse de contenus mensongers, elle pourrait bien inonder les réseaux sociaux et cibler les utilisateurs avec une déferlante de fausses informations sur le réchauffement climatique.

« Nous pouvons voir l’IA fracturer l’écosystème de l’information alors que nous avons besoin de le rassembler », alerte Michael Khoo. « L’IA est parfaite pour inonder la zone de contenus de piètre qualité produits à bas coût. On peut facilement imaginer comment elle deviendra un outil de désinformation climatique. »

Appels à la transparence et à la régulation

Face à ces risques, le rapport du CAAD préconise une transparence accrue sur la consommation énergétique de l’IA, ainsi que des garde-fous pour surveiller la diffusion de fausses informations sur le climat. Jesse Dodge, chercheur à l’Allen Institute for AI, partage ces inquiétudes et souligne que l’IA pourrait accélérer la production de vidéos et d’images trompeuses (deepfakes) sur les enjeux environnementaux.

Cependant, M. Dodge reste « prudemment optimiste » quant au potentiel de l’IA pour lutter contre le réchauffement, citant des projets prometteurs dans la modélisation du climat ou la protection des espèces menacées. Mais il insiste sur la nécessité pour les entreprises d’être totalement transparentes sur leur impact énergétique.

Conclusion

Si l’IA recèle sans doute des applications positives pour l’environnement, les mises en garde du Climate Action Against Disinformation méritent d’être prises au sérieux. Loin des discours enthousiastes des entreprises technologiques, cette nouvelle étude rappelle que l’IA n’est pas une solution miracle et qu’elle pourrait aggraver les problèmes énergétiques et de désinformation liés au changement climatique. Une réglementation stricte et une transparence totale de la part des développeurs semblent indispensables pour éviter ces risques majeurs.

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